L’article de A. Cramer, « A propos des hallucinations chez les sourds-muets malades mentaux, avec quelques remarques sur la signification des images sonores de mots et des images motrices de mots dans les hallucinations auditives », est paru dans les Archives de psychiatrie à Berlin en 1896 (pp. 875-897). Jacques Adam l’a traduit et a rédigé une introduction pour le numéro 28 de la revue Analytica, Cahier de recherche du Champ freudien (pp. 3-28) chez Navarin Editeur, diffusion Seuil à Paris en 1982.
Il est difficile de savoir si Lacan connaissait ce texte. La chose est probable puisque, durant son séminaire sur Les structures freudiennes des psychoses du 8 février 1956, après avoir évoqué « la relation de bouche à oreille » mise en évidence par le phénomène de ladite hallucination verbale psychomotrice, il fera référence au langage des sourds-muets pour souligner le lien qu’il y a « entre l’ouïr et le parler qui n’est pas externe, au sens où l’on s’entend parler, mais qui se situe au niveau même du phénomène du langage » (pp. 154-155 aux éditions du Seuil). Il reviendra, un an plus tard, sur ce problème dans son article « D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », pour préciser que le cas des sourds-muets hallucinés démontre en quoi l’hallucination, abusivement qualifiée d’auditive, est irréductible au sensorium et qu’elle est donc fondamentalement verbale (Ecrits, p. 532).
Aussi peut-on supposer que ces remarques s’inscrivent sans doute elles-mêmes dans la continuité de ses réflexions et de son intervention de 1949 suite à l’exposé de J. Rouart intitulé « Délire hallucinatoire chez une sourde-muette » (paru dans le fascicule II de L’évolution psychiatrique en 1949). Il lui était alors venu à l’esprit l’idée selon laquelle « c’est l’ouïe qui empêche d’entendre ».