Collection « Essaim » chez érès
Notre projet de collection s’inscrit dans la suite d’un parcours mené depuis 1998 avec la revue Essaim : après avoir fait l’hypothèse de l’existence d’une communauté analytique issue de l’enseignement de Lacan malgré sa dispersion actuelle, puis pris conscience d’un nécessaire débat général à mener sur l’existence d’un champ lacanien, nous souhaitons aujourd’hui nous adresser à ces auditeurs et lecteurs rencontrés au fil des journées d’étude, des colloques et des numéros publiés, qui, même s’ils ne sont pas spécialistes, se sentent concernés et demandent :
– de mieux comprendre la psychanalyse dans ses rapports et ses effets avec le monde actuel, sans pour autant passer par des ressassements (alors même qu’est proclamée une prétention à la nouveauté) ou par sa psychologisation
– de rencontrer Lacan au-delà des jeux de mots et des citations bien connus, plus ou moins conformes à l’original, voire plagiés.
De ces échanges répétés avec ce « public » a ainsi émergé la volonté d’offrir un espace possible pour une circulation féconde entre l’expérience de la psychanalyse et celle de spécialités aussi diverses que la philosophie, la littérature, les beaux-arts, les composantes des sciences humaines (la pédagogie, la sociologie…), considérant que le format fédérateur d’une collection peut enclencher une telle synergie, issue à la fois d’un travail de recherche et de terrain. La visibilité de la maquette commune aux ouvrages doit contribuer à manifester un état d’esprit « collection ».
Il s’agit de dépasser le simple constat d’un lien entre la psychanalyse et différentes spécialités, sans verser dans une vulgarisation au sens que Wittgenstein lui accorde dans sa leçon sur l’éthique (faire croire à quelqu’un qu’il comprend quelque chose qu’il ne comprendra jamais). Notre objectif est, en réalité, triple : révéler les points de capiton entre la psychanalyse et d’autres disciplines, faire émerger des positions critiques, encourager d’éventuelles « trouvailles » au sens où Lacan l’entendait – non pas pour dire « plus que », mais pour proposer un « après ».
Il s’agirait donc de privilégier, sous la forme d’ouvrages assez courts (150 pages maximum) :
– un dire au travail : avec la psychanalyse et d’autres disciplines, avec les auteurs, avec les lecteurs, cherchant ainsi à ne pas tomber dans l’écueil d’une pensée systématiquement sur et prisonnière de sa « chapelle »
– un souci du lecteur : certes, il a indubitablement « à y mettre du sien » comme le disait Lacan, mais il a aussi à « s’y retrouver », pourvu qu’on lui en donne la possibilité en lui proposant un livre dont l’ordonnancement de la pensée lui permettra de prendre sa place ou de (re)trouver la sienne suivant les thèmes et questionnements proposés
– une exigence de littéralité : force est de constater que depuis une dizaine d’années, Lacan est peu lu, étant par conséquent davantage connu à travers et d’après des auteurs ou commentateurs que par ses écrits. Aussi souhaiterions-nous pouvoir parler et penser avec Lacan, en lui re-donnant sa voix grâce à une exigence de citations et de références précises, condition d’une possibilité d’aller au-delà de ses avancées
– un effort de lisibilité : en soignant l’esthétique des ouvrages, la qualité d’un langage concis (non « jargonneux ») ainsi que les interactions possibles entre les différents ouvrages qui composeront la collection, afin d’éviter que notre effort de transdisciplinarité ne se perde dans un « éparpillement » généralisé.
Dorothée Muraro, Erik Porge